Un Email doit-il être considéré comme un avertissement ?
Ceci n’est pas un point anodin. Les conséquences sont très importantes pour le salarié, mais aussi pour l’employeur. En effet, si l’employeur a déjà sanctionné son collaborateur d’un avertissement en raison de faits précis, il ne peut plus ensuite utiliser ces mêmes faits pour le licencier ensuite. Il a en fait épuisé son pouvoir disciplinaire. Les mêmes faits ne peuvent pas donner lieu à deux sanctions successives. En droit, c’est la règle non bis idem.
Par conséquent il est important de savoir si l’Email de reproches reçu par le salarié a ou non la nature d’un avertissement.
En principe, un Email de reproches adressé par l’employeur à un collaborateur afin de sanctionner un comportement a bien la nature d’un avertissement.
L’article L.1331-1 du Code du travail dispose que constitue une sanction « toute mesure autre que les observations orales » prises par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif. Or, Un Email est bien un écrit : ce n’est pas une simple observation orale. Donc c’est un avertissement.
La Cour de cassation le confirmait dans une décision du 9 avril 2014. Mais dans cette affaire, l’Email reçu par le salarié n’était pas un simple rappel à l’ordre, mais avait bien la nature d’un avertissement par son contenu.
Dans un arrêt récent, en date du 19 septembre 2018, la Cour de cassation juge au contraire qu’un rappel à l’ordre ne constitue pas une sanction disciplinaire. Dans cette affaire, il s’agissait d’un rappel à l’ordre adressé à plusieurs salarié sur un sujet donné. Puis un licenciement était intervenu. La Cour d’appel avait initialement jugé que l’employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire par ce rappel à l’ordre et ne pouvait donc plus licencier pour le mêmes faits. Mais la Cour de cassation juge au contraire qu’un rappel à l’ordre ne constituait pas une mesure disciplinaire.
Donc c’est à voir au cas par cas car le salarié ne pourra jamais être sanctionné deux fois pour les mêmes faits.
Source : cassation sociale 19 septembre 2018, n° 17-20193. Yves Nicol avocat tLyon droit du travail.