Si le télétravail à domicile est demandé par le salarié, l’employeur n’a aucune obligation de compenser quoi que ce soit et d’accorder une quelconque prime. Le Ministère du travail le rappelle d’ailleurs clairement dans son « Guide du télétravail ». D’ailleurs le plus courant est que l’avenant au contrat de travail que signe le salarié mentionne que cette organisation du travail est à sa demande.
Ce type de fonctionnement est équilibré : le salarié économise temps de transport, frais de déplacement, carburant… etc…etc… On connait les avantages, qui sont aussi importants pour le salarié que pour l’employeur.
La situation est différente si le télétravail domicile est imposé par l’employeur.
Le salarié met à la disposition de son employeur une partie de son domicile à des fins professionnelles et cela nécessite une compensation.
Le télétravail à domicile a été défini par l’Accord National Interprofessionnel du 19 juillet 2005, puis ultérieurement par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012.
Depuis la jurisprudence NESTLE, la Cour de cassation a posé le principe suivant lequel l’occupation du domicile à des fins professionnelles constitue une immixtion dans la vie privée et n’entre pas dans l’économie générale du contrat de travail, sauf dispositions particulières définies par les parties.
L’employeur doit donc indemniser le salarié de cette sujétion particulière ainsi que des frais engendrés par l’occupation à titre professionnel du domicile.
« L’occupation, à la demande de l’employeur, du domicile du salarié à des fins professionnelle constitue une immixtion dans la vie privée de celui-ci et n’entre pas dans l’économie générale du contrat de travail ; que si le salarié, qui n’est tenu ni d’accepter de travailler à son domicile ni d’y installer ses dossiers et des instruments de travail accède à la demande de son employeur, ce dernier doit l’indemniser de cette sujétion particulière ainsi que des frais engendrés par l’occupation à titre professionnel du domicile. » Cass.soc 7 avril 2010, n°08-44865 à 08-44869
Pour la Cour de Cassation sont concernés aussi bien les télétravailleurs que tout salarié amené à effectuer une partie de ses tâches à son domicile. La sujétion du travail au domicile n’est donc pas forcément liée à l’utilisation des nouvelles technologies. La contrepartie pécuniaire dorénavant exigée vise le fait de devoir travailler à son domicile, y installer ses dossiers et transformer une partie de ce domicile en bureau. Cette sujétion ne doit pas être confondue avec les frais engagés par le salarié pour effectuer ses tâches à son domicile. Dans le cas d’espèce, les frais étaient bien pris en charge par l’employeur.
L’indemnité de sujétion visant à indemniser le salarié d’une contrainte spécifique, il s’agit d’un élément de rémunération, soumis à cotisations sociales. Les frais professionnels sont quant à eux exonérés de charges sociales sous certaines modalités et conditions.
L’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 19 juillet 2005, mettant en œuvre l’accord-cadre européen du 16 juillet 2002, a posé les principes généraux du télétravail.
Le télétravail a été défini comme suit (article 1 de l’ANI du 19 juillet 2005) : « Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de travail et dans laquelle un travail qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière. »
Un salarié peut donc être un télétravailleur sans travailler à son domicile ou travailler à son domicile sans être télétravailleur : c’est la notion de régularité qui est prépondérante pour considérer un salarié comme télétravailleur et non celle du quantum de l’activité.
Les entreprises doivent distinguer les frais professionnels qu’elles ont l’obligation de prendre en charge, tels les frais de communication ou d’installation de ligne téléphonique, abonnement internet, et cette indemnité de sujétion.
Pour les frais professionnels, il est à noter que l’ANI du 19 juillet 2005 prévoit que l’employeur « fournit, installe et entretient les équipements nécessaires au télétravail. Si, exceptionnellement, le télétravailleur utilise son propre équipement, l’employeur en assure l’adaptation et l’entretien. L’employeur prend en charge, dans tous les cas, les coûts directement engendrés par ce travail, en particulier ceux liés aux communications. Il fournit au télétravailleur un service approprié d’appui technique. »
Lorsqu’un salarié occupe à titre professionnel son domicile, c’est selon les cas, soit à la demande de l’employeur, soit une demande commune.
Mais dans les deux cas, l’employeur, doit indemniser le salarié de cette sujétion particulière.
Voir aussi une décision récente de la Cour d’appel de Lyon, en date du 20 mars 2019, condamnant une entreprise à payer au salarié cette « prime de sujétion ».
Source : Yves Nicol, avocat Lyon droit du travail mai 2010. CA Lyon 20 mars 2019, n° 17/00107