DEMANDER A MOHAMED DE DEVENIR LAURENT

En entreprise, peut-on demander à un salarié prénommé Mohamed, de se faire appeler Laurent ? Ceci constitue-t-il une discrimination ?

Dans cette affaire les faits se déroulaient dans une maison de retraite et il avait été demandé au salarié, lors de son embauche, de se faire appeler Laurent par les résidents. C’est effectivement ce qu s’est produit.

Mais deux ans plus tard, l’intéressé a demandé à son employeur de reprendre son prénom : Mohamed. Et c’est là que les difficultés sont apparues et que l’affaire a commencé…Le salarié a demandé une réparation en justice et formulé une demande de dommages et intérêts pour discrimination.

La Cour d’appel déboute le salarié dans un premier temps

Dans un premier temps, la Cour d’appel avait rejeté la demande du salarié et donné raison à l’employeur. La Cour accepta l’argumentaire de l’employeur qui expliquait que quatre salariés se prénommaient déjà Mohamed. Ce qui ne pouvait qu’entraîner une confusion auprès des résidents, souvent âgés, raison pour laquelle il avait demandé à Mohamed de devenir Laurent. Pour la Cour d’appel, cet argument était recevable, d’autant plus que le salarié avait, lors de son embauche accepté l’usage d’un autre prénom pour les besoins de son activité professionnelle.

Pour comprendre la situation en droit à ce stade, il faut s’intéresser à l’article L.1134-1 du Code du travail. Si le salarié demandeur doit présenter au juge des éléments de fait « laissant supposer l’existence d’une discrimination », l’employeur en défense doit quant  lui prouver que sa décision est « justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ».

La Cour de cassation dit non

Mais la Cour de Cassation dit non et juge que le fait de demander au salarié de changer son prénom de Mohamed , emblématique d’une religion, est de nature à constituer une discrimination. La pluralité de salariés portant le même prénom au sein d l’entreprise ne constitue pas un élément objectif suffisant permettant de justifier valablement la discrimination en raison de l’origine du salarié.

Les arguments avancés par l’employeur ne constituent pas les éléments objectifs suffisants et il s’agit donc d’une discrimination.

De façon beaucoup moins spectaculaire, on voit quelquefois en entreprise des salariés opter, sur leur carte de visite, surtout lorsqu’ils sont commerciaux, pour un prénom francisé. Mais dans ce cas je ne sais pas qui en est à l’origine : l’employeur ou le salarié ?

 »Source : Yves Nicol avocat Lyon droit du travail. Cassation sociale 10 novembre 2009, n° 08-42.286

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